Comme un Roman |
En écrivant Comme un roman , Daniel Pennac a accompli un véritable tour de force (qui plus est avec modestie!): réussir un hymne à la lecture tout en la désacralisant! Il nous plonge littéralement dans nos propres pensées (à travers les siennes), nous encourageant à interroger notre rapport personnel à la lecture, abordant avec simplicité et humour une multitude de situations parmi lesquelles chacun pourra se reconnaître ça et là – sinon partout! Il s'agit d'une analyse limpide d'une société multi-facettes et d'une critique pertinente d'un système d'éducation à la pédagogie inadaptée et aux exigences décalées par rapport à ses supposés objectifs. En cela, il s'adresse à tous, adolescents comme adultes, lecteurs "amateurs" comme professeurs de lettres, prolétaires comme intellectuels… Un livre contre la discrimination inter-lecteur en quelque sorte! |
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Bref cet essai est une sorte d'extrémisme de la tolérance (si je peux me permettre ce quasi oxymore!), indispensable pour (re)voir fleurir en chacun cette envie profonde de lire, cette fascination qui nous habite quand on la découvre – celle-là même que Pennac décrit de façon remarquable dans la première partie, Naissance de l'alchimiste , plongée sublime dans cette seconde naissance qu'est l'apprentissage progressif de la lecture au fil de notre enfance. |
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Evidemment, Pennac l'avoue implicitement: passé un certain stade de rejet et/ou d'oubli, il faut savoir impulser aux autres ce retour au livre, qui n'est donc pas si volontaire mais pas imposé non plus. De ce côté-là, ses exemples sont si enthousiastes qu'ils paraissent parfois utopiques mais ils n'ont aucune prétention à se revendiquer comme un mode d'emploi unique. Non. Il ne s'agit que d'anecdotes croustillantes et encourageantes (d'aucuns diront optimistes), montrant le chemin du possible sans pour autant en dissimuler les complexités. C'est le sujet essentiel de sa troisième partie, Donner à lire , exhortation au cadeau de la lecture, avec toute sa pluralité d'alternatives. |
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Le premier, le droit de ne pas lire, devrait nous inciter à l'ignorer, de même que le second, le droit de sauter des pages , pourrait nous donner envie de le parcourir à moitié. Et le troisième, le droit de ne pas finir un livre , nous donne la possibilité de ne pas lire les droits suivants. Tout semble quasi contradictoire et en même temps simpliste… et pourtant! A la lecture de ses droits, le lecteur de Comme un roman se sent libre, les phrases fusent dans son esprit comme s'il les avaient lui-même pensées car elles frappent l'essentiel. Véritable apogée de cet essai, résumé essentiel des réflexions de Pennac, les droits du lecteur s'imposent à tous comme évidents et enthousiasmants. Le lecteur peut même être surpris de réaliser à quel point ils s'inscrivent rapidement dans sa chair, devenant déjà des instincts de lecteurs qui lui permettront de vaquer librement à ses lectures futures. |
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Raphoufoune |